Parce qu’un tableau est une façon d’explorer de quoi nous sommes faits.
En 2011, j’avais réalisé une toile où tout semblait en suspension, où tout poussait dans le vide avec juste un très maigre contact avec le sol. Ces organismes évoluaient pratiquement en apesanteur. Leurs croissances semblaient être générées plus par eux-mêmes que par toute forme de nourriture puisée dans leur environnement. Ce monde hors-sol m’apparaissait précaire car trop fragile par manque d’ancrage évident. Si bien qu’en fin de réalisation, et après avoir longuement transpiré sur l’ouvrage, j’éprouvai le besoin d’apporter un symbole connu de tous pour ses actions de secourisme à savoir, une croix rouge. Ce monde demandait en quelque sorte de l’aide. J’avoue ne pas avoir compris tout ce que cela décrivait en fin de compte. Je l’incluais dans une série appelée « Et maintenant » et l’intitulais « Conditions culturales-Hors-sol » ( 116x173cm). Je savais au fond de moi qu’il ne parlait pas seulement de techniques d’agriculture mais de culture au sens large. J’oubliai même ce tableau que d’ailleurs je n’appréciais pas particulièrement et pour cause, tout en sachant intimement qu’un jour j’aurais la maturité pour l’approcher de plus près.
En voguant sur le net, 5 ans après, ce jour arriva! Je suis tombée sur ce discours de Patrick Viveret – Philosophe, membre de l’Observatoire de la décision publique et cofondateur du Collectif Roosevelt. OuiShare, collectif qui réfléchit sur une économie collaborative au service des territoires, l’avait invité au festival Sharing Lille.
En écoutant son discours sur les nouvelles formes de richesse (voir plus bas), ce tableau est brusquement remonté à ma mémoire. Sa lecture est devenue claire! Ce maître de la sémantique nous parle de la nécessité de se mettre en marche pour une autre économie.
Reconsidérer nos richesses et habiter nos vies, ainsi que nos territoires ne se fera pas par une économie hors-sol.
Le PIB (produit intérieur brut) selon Bob Kennedy en 1968 – Video V.Egloff – Musique Dexter Britain
L’artiste -selon moi- ne peut traiter que de deux choses, lui ou son environnement, mais de cela il n’est pas toujours conscient. Il semblerait que mon mobile soit souvent de traduire notre monde. Donc je m’appuie sur des formes en couleurs, fruit de mon imagination, ne sachant pas manier suffisamment bien les mots. Mais ce qui m’étonne, c’est que la compréhension de ce que je décris me vient toujours ultérieurement grâce aux mots prononcés par les autres.
Les mots d’un sage éclairent toujours !