Le glitch ou l’art d’esthétiser les bugs, car les erreurs sont parfois rayonnantes.
Un jour, au hasard d’une performance à laquelle je participais, j’ai croisé un artiste mordu d’art numérique. Moi qui suis essentiellement dans une expression artistique disons plus « main dans le cambouis », je suis restée bien intriguée par cette façon de faire de l’art. Il faut bien l’avouer cela me dépassait carrément car je ne me sens pas l’âme d’une geek.
J’avais gardé ça dans un coin de ma tête et l’autre jour, en passant en revue mes mails, quelqu’un me suggéra une vidéo à regarder. En fait, elle ne fonctionnait pas très bien alors je suis allée en avant, puis en arrière, puis encore en avant désespérée d’arriver à voir quelque chose de correct et là ça c’est carrément mis à bugger. Je me suis alors retrouvée devant des images incroyables et pour en garder la trace, j’ai vite fait des captures d’écran. C’était indéniablement une belle et hallucinante matière artistique. J’ai laissé ça de côté ne sachant qu’en faire.
Quelques jours après, je suis retombée sur ces curieuses images. Je ne sais pas pourquoi mais mon imaginaire y a immédiatement superposé des portraits de Modigliani. Vous me direz rien à voir, je vous l’accorde. J’ai sans doute pensé à cet artiste si malmené de son vivant car j’étais hantée par cette dernière vente aux enchères où une de ses toiles fut adjugée 170 millions de dollars.
Lui qui vécut si misérablement, lui qui ne fit qu’une seule et unique expo, lui qui ayant peint de splendides nus avec des poils pubiens -vous vous rendez compte ma bonne dame- se vit retirer ses toiles de l’expo, lui qui de ce fait ne vendit aucune toile et lui qui mourut désespéré 3 ans après en se suicidant, sa compagne enceinte le suivant dès le lendemain.
L’histoire de l’ART au moment où il se crée comporte BIEN DES BUGS, tout comme le glitch.
L’idée m’a plu, alors je me suis lancée grâce à un logiciel photo dans ce découpage numérique de l’œuvre de Modigliani sur fond de glitch. Ainsi je rends hommage aux deux simultanément et j’ai vu dans ces bugs informatiques toute une beauté que je n’avais moi-même pas forcément appréciée auparavant.
Mais plus que cela, il existe le glitch art né de l’esthétisation d’erreurs analogiques ou numériques, par corruption volontaire de code ou de données. Je trouve que c’est une image représentative de notre époque bien brouillée comme on peut le constater. Toutefois dans l’erreur, il n’y a pas que des déchets… il y aussi des trésors…
L’artiste qui m’a sensibilisé à l’art glitch est David Lepolar. Il organise d’improbables ateliers numériques notamment sur l’art glitch et tellement d’autres aussi.
J’ai abouti à ce résultat sans le rechercher mais si vous voulez vous tirer un drôle de portrait aller voir le site de Benjamin Gaulon. Sur le net vous trouverez de nombreux tutos pour glitcher avec divers logiciels.