Les mouchoirs de poche ont d’innombrables usages possibles (ou plutôt avaient devrais-je dire). Ces objets insignifiants assouvissaient toutes sortes de besoins, des plus triviaux aux plus nobles. Alors qu’ils ont disparu de nos vies quotidiennes, ici, ils poursuivent leur vie comme œuvres d’art.
J’aime travailler sur des supports insolites. Au hasard de mes pérégrinations , de nouveaux matériaux se manifestent à moi. Je les récupère et les stocke pendant parfois de longues années. Ils me suivent dans mes nombreux déménagements. Aussi, je maudis cette habitude de tout trimbaler. Et puis un jour, au hasard d’une revue réprobatrice sur d’éventuels futurs supports peinture, ils sortent de l’état de stock de matières premières en me clignant de l’œil sur les étagères, pour rentrer dans un plus valorisant état d’œuvres. C’est leur instant de célébrité ! Là j’ai choisi des anciens mouchoirs, … Mais pourquoi des mouchoirs de poche???
Créer sur un mouchoir de poche brodé, c’est y humer quelques atomes de vie.

Les mouchoirs ont tous une histoire
Apparus en Chine à partir de 1000 avant JC, ces carrées de tissu ont eu des fonctions et utilisations très variées. J’ai donné ici à ces banals objets peut-être encore une nouvelle fonction. Freud aurait appelé cela un acte de sublimation.
Ce qui m’a séduit dans cette récupération, c’est que les mouchoirs ont tous une histoire, puisqu’ils suivaient leur propriétaire pendant des années voire des décennies. Les mouchoirs connaissaient leur possesseur par cœur et intimement même. Ils étaient empreints de lui ou d’elle. Ils avaient soulagé son nez, dit adieu sur le quai d’une gare, protégé son bébé du soleil, rectifié une ligne de maquillage, été confiés en gage d’amour, ils ont épongé sa sueur, mis une touche élégante à son revers de veste, masqué des yeux pour jouer à Colin-maillard, attrapé au vol un éternuement…absorbé des larmes!

Méditations ô Jardin : tondos, acrylique et broderies machine et manuelles sur mouchoirs datant d’un siècle.
Une renaissance en somme
Ces petits mouchoirs proviennent de mes aïeux et sont imprégnés des drames familiaux. Ils contiennent donc mes larmes par procuration. Aussi, les peines et les rudesses qui les habitent se perpétuent jusqu’à moi. Une grande lessive s’est imposée pour les blanchir au sens propre comme au sens figuré. Alors qu’ils séchaient au soleil de mon jardin, je les regardais frissonner dans le vent, tout revigorés d’un blanc immaculé particulièrement capteur de lumière. Un blanc parfait pour imprimer de nouvelles partitions tout en couleurs directement siphonnées de mes rêveries au jardin.
Des partitions colorées et sereines s’y sont déposées et ont sublimé ces basiques mouchoirs de poche. Ils sont chargés dorénavant de la source vive qui irrigue et éveille mon jardin en ce début de printemps. Et ces mouchoirs pavoisent maintenant tout emplis d’instants poétiques interceptés et vécus DANS et PAR la NATURE. Une renaissance en somme, après guérison !
Cette série de broderies constitue une apostrophe à mi-chemin entre la louange poétique, l’exclamation admirative devant la beauté de la nature et l’invitation à en prendre soin. Un jardin, nourricier ou pas, ordonnancé par le travail humain ou foisonnant de végétation est un lieu de ressourcement, de réflexion et de rêverie.
Une plongée contemplative dans de tels espaces est un acte véritablement guérisseur. Essayez !
Composée de 16 pièces, cette collection a été réalisée sur des mouchoirs classiques de Cholet vieux de 150 ans environ et brodés aux initiales de leur propriétaire.
Décalcomanies de photos végétales, acrylique, dessins directs à main levée à la machine à coudre, et rehauts de broderie de fils précieux réalisés manuellement, le tout tendu sur médium.
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